Modélisation des cours d’eau et évolution du volume sédimentaire

Contexte

Les aménagements hydroélectriques exercent une influence sur les cours d’eau en aval des prises d’eau et des barrages avec pour conséquence un débit d’eau fortement réduit et une capacité de transport des sédiments diminuée ainsi que des purges fréquentes impactant la stabilité des berges. Dans certains cas, le cours d’eau ne parvient plus à évacuer sa charge sédimentaire et un dépôt se forme progressivement jusqu’à provoquer un exhaussement du lit (surélévation du lit), ce qui peut engendrer un danger pour les infrastructures humaines : routes, habitations, ponts…

Dans ce cas précis, les aménagements réalisés dans le cadre du complexe de la Grande-Dixence avec plusieurs prises d’eau dans le Val d’Arolla ont provoqué une lente surélévation du lit de la Borgne d’Arolla dans différents secteurs, jusqu’à devenir une menace pour la route et les habitations notamment dans le secteur de Satarma-Pramousse, l’exhaussement ayant atteint plusieurs mètres par endroits depuis la construction de la Grande-Dixence dans les années 1950-1960 et certains bâtiments sont maintenant situés sous le niveau de la rivière à Pramousse. Un suivi régulier de l’évolution de la rivière est donc indispensable et la modélisation par drone apporte une solution rapide, efficace et fiable afin de calculer d’année en année les volumes déposés ou érodés ainsi que de mettre en évidence les zones où l’évolution est la plus forte.
Le principe est de réaliser un modèle numérique de terrain (MNT) par photogrammétrie ou LiDAR à intervalles réguliers, puis de calculer les différences entre ces MNT pour réaliser des cartographies de MNT des différences dont l’échelle de couleurs représente les zones de gains en hauteur en vert (donc un dépôt) et les zones de diminution de hauteur en rouge (donc une érosion).
Ces cartographies vont mettre en évidence des phénomènes comme l’évolution de chenaux de la rivière, l’érosion de certaines berges ou digues, les dépôts par les systèmes torrentiels latéraux et les modifications du territoire par l’homme avec notamment le rehaussement de la route d’Arolla apparaissant en vert et le renforcement de la digue la protégeant apparaissant en rouge en raison du déplacement de cette dernière.

Nuage de points 2022 avec la M300RTK + P1
Nuage de points 2022 avec la M300RTK + P1
Comparaison visuelle entre l’état de la rivière en 2016 et en 2022 à l’aide des orthomosaiques

Matériel et procédé

Un premier vol a été effectué en 2016 avec un eBee RTK Sony et la caméra WX220 pour l’Université de Lausanne.
110 photos capturées en mode nadir
GSD moyenne : 3cm/pixel

Un second vol a été réalisé en 2022 avec la Matrice 300 RTK et la caméra P1.
1816 photos capturées en mode smart oblique
GSD moyenne : 1.3cm/pixel

Ombrage du relief (hillshade) du MNS 2022 (Modèle de surface). La microtopographie des chenaux de la rivière est très bien mise en évidence.

Les deux vols ont été effectués en mode RTK connecté au réseau Swipos, sans point de contrôle.
Les vols ont ensuite été traités individuellement avec Pix4Dmapper pour produire un MNT et un MNS (Modèle Numérique de Surface), puis travaillés dans ArcGIS afin de produire différents visuels (hillshade) et calculer les MNT des différences.
La photogrammétrie a été choisie dans ce cas afin d’assurer une continuité dans la prise de mesures débutée avec cette méthode, toutefois certaines erreurs dans la reconstruction et le filtrage de la végétation apparaissent dans la carte.
Par conséquent, le LiDAR serait probablement plus adapté dans cette situation afin d’obtenir une topographie complète à travers les zones végétalisées, même si la photogrammétrie donne un excellent résultat avec les appareils modernes de type P1. 

MNT des différences entre 2016 et 2022